Charles kerivel, les carnets du destin
Yann Rivallain
Bien connu des Penn-sardin à qui Charles Kerivel a consacré une série de bandes dessinées, au fil des décennies, le talentueux dessinateur douarneniste est aussi devenu une personnalité familière dans le grand sud marocain. De ses innombrables voyages dans ce pays, il rapporte des milliers de croquis, de dessins et d’aquarelles qu’il retravaille dans son atelier brestois et expose régulièrement en Bretagne et au Maroc.
Assis devant son chevalet, entouré de peintres amateurs, Charles Kerivel dessine d’un trait rapide les tours du ksar Aït-Ben-Haddou, le célèbre village fortifié de la région de Ouarzazate, au sud du Maroc. Sur cette photo prise lors d’un des stages de peinture qu’il organise chaque année, le dessinateur breton est manifestement dans son élément. Une telle aisance peut paraître étonnante dans cet univers écrasé de chaleur, dominé par l’ocre rouge de l’imposante forteresse des sables. Ni la poussière ni le sable fin qui recouvre son carnet d’aquarelles ne semblent le gêner. Au fil des heures, inlassablement, il plie et déplie son chevalet, entraînant son groupe dans les ruelles qui serpentent entre les habitations de terre, parlemente avec une jeune Berbère pour la convaincre de prendre la pose. Saison après saison, comme dans d’autres endroits du Maroc, dont Essaouira, les habitants se sont habitués à voir ce personnage attachant, portant le gilet beige des baroudeurs, la casquette toujours vissée sur le crâne, sortir sa boîte d’aquarelles et se mettre à peindre parmi eux. À l’aise dans un univers pourtant si éloigné des cieux tourmentés de Bretagne, des ruelles qui descendent au port du Rosmeur à Douarnenez, de la grève de Treboul, ce deuxième Maroc, surnommé ainsi à cause du teint hâlé de ses pêcheurs qui traînaient autrefois leurs filets sur les côtes africaines. Si loin mais pourtant si proche, tel est le sentiment que ressent depuis toujours le peintre finistérien en évoquant ces