Commentaire "Automne malade", Guillaume Apollinaire
Automne malade
Automne malade et adoré
Tu mourras quand l’ouragan soufflera dans les roseraies
Quand il aura neigé
Dans les vergers
Pauvre automne
Meurs en blancheur et en richesse
De neige et de fruits mûrs
Au fond du ciel
Des éperviers planent
Sur les nixes nicettes aux cheveux verts et naines
Qui n’ont jamais aimé
Aux lisières lointaines
Les cerfs ont bramé
Et que j’aime ô saison que j’aime tes rumeurs
Les fruits tombant sans qu’on les cueille
Le vent et la forêt qui pleurent
Toutes leurs larmes en automne feuille à feuille
Les feuilles
Qu’on foule
Un train
Qui roule
La vie
S’écoule
Guillaume Apollinaire, Alcools, 1913
Intro : De Ronsard à Prévert, en passant par Chateaubriand, Baudelaire et Verlaine, l'automne a inspiré de nombreuses générations de poètes. Né quant à lui sous le signe de la Vierge, qui marque le début de l'automne, Apollinaire a fait de cette saison, associée souvent au temps qui passe, à la mort, aux souffrances de l’amour et ainsi aux fins des amours, sa saison privilégiée. Il écrit d’ailleurs : « Mon automne éternelle ô ma saison mentale ». Dans le poème « Signe », il rappelle aussi cette idée : « Je suis soumis au chef signe de l’Automne ». C’est pourquoi « Automne malade » s’inscrit naturellement dans cette optique. Ce poème est issu du recueil Alcools, recueil qui est principalement consacré à l’automne. Le poème en lui-même a été publié en même temps que son recueil (1913), mais des ébauches ont pu être reconnues à partir de 1902. Le thème lyrique d’ »Automne malade » est certes traditionnel, mais l’originalité d’Apollinaire reste fortement percevable. La première strophe est un quatrain qui parle de la menace qui pèse sur l’automne, la deuxième est un septain qui annonce l’arrivée destructrice de l’hiver et la fin de la beauté de l’automne, la troisième est un distique qui revient à un sujet qui remémore le printemps et la dernière est un dizain qui marque la fuite du