Commentaire de "nox", extrait des châtiments, parties 1 et 2
Lecture méthodique de “Nox”
Premier (avant Les Contemplations et La Légende des siècles) des trois grands recueils poétiques de la maturité, tous rédigés en exil, Les Châtiments furent aussi celui qui eut le moindre écho en France, en raison de la censure, qui en entrava la diffusion. Véhémente protestation contre le coup d’État de Louis Napoléon Bonaparte, ce recueil fut, malgré l’urgence dans laquelle il fut rédigé, soigneusement structuré. Ce souci de composition est patent dès le tout premier poème, “Nox”, qui fait pendant au dernier poème, “Lux”, et évoque les circonstances nocturnes du coup d’État. Nous étudierons d’abord le portrait qui est fait du prince-président, puis celui des autres personnages du drame, acteurs ou victimes. Enfin, nous verrons que le choix énonciatif du texte, transformant en harangue ce qui aurait dû être un récit, lui confère une force polémique saisissante.
1.Quel portrait est fait du prince-président ?
Celui d’une créature nocturne. Car, dès le début du texte, le prince est associé au thème de la nuit, de l’obscurité. Un thème lancé dès le titre, avec “nox”, mot latin signifiant nuit, qui amorce le champ lexical de l’obscurité : “nuit” ; “lampe” ; “dort” ; “oreiller” ; “son brouillard le plus noir” ; “l’ombre” ; “l’heure de la proie”. Ce champ lexical renvoie à deux référents :
- les circonstances historiques du renversement de la République, puisque le coup d’État a été déclenché pendant la nuit du 2 décembre 1851.
- la métaphore du secret, du mystère, qui ont enveloppé sa préparation : ourdi dans l’om-bre, comme un crime honteux, le coup d’État est associé à une embuscade, un guet-apens.
En effet, le texte tout entier repose sur la métaphore associant le prince-président à un brigand préparant une embuscade. Le prince-président est à peine décrit, mais ses gestes et ses postures, ses accessoires, voire ses yeux, suggèrent un être louche, sournois, fourbe et lâche. La démarche est à l’image de ses