"Toute loi, avons-nous dit, vise l'intérêt commun des hommes, et c'est seulement dans cette mesure qu'elle acquiert force et valeur de loi. Dans la mesure, au contraire, où elle ne réalise pas ce but, elle perd sa force d'obligation (…) Or, il arrive fréquemment qu'une disposition légale utile à observer pour le bien public en règle générale devienne, en certains cas, extrêmement nuisible. Car le législateur, ne pouvant envisager tous les cas particuliers, rédige la loi en fonction de ce qui se présente le plus souvent, portant son attention sur l'utilité commune. C'est pourquoi s'il surgit un cas où l'observation de telle loi soit préjudiciable au bien commun, celle-ci ne doit plus être observée.
Ainsi à supposer que dans une ville assiégée on promulgue la loi que les portes doivent demeurer closes, c'est évidemment utile au bien public, en règle générale; mais s'il arrive que les ennemis poursuivent des citoyens dont dépend le salut de la cité, il serait très préjudiciable à cette ville de ne pas leur ouvrir ses portes. Et par conséquent dans une telle occurrence, il faudrait ouvrir les portes, malgré les termes de la loi, afin de sauvegarder l'intérêt général que le législateur a en vue."

Intro : Contrairement à ce que l’on peut croire, la justice ne se limite pas qu’à l’application stricte d’une loi. Il y a d’abord un raisonnement humain. On comprend alors que dans certaines circonstances, il faut enfreindre la loi afin de servir la société et la justice. Ainsi Saint Thomas d’Aquin nous dévoile sa vision des faits en trois parties. Dans un premier temps, nous nous consacrerons à sa définition d’une loi et son but; puis nous verrons comment appliquer une loi de façon juste, et enfin nous exploiterons l’exemple de l’auteur à son époque. I. Justice et loi, dans quel but ?
Selon Saint Thomas d’Aquin, « toute loi sans exception vise l’intérêt commun des hommes », c’est-à-dire que toutes les lois mises en place servent à assurer la paix et la tranquillité