Commentaire de texte Victor Hugo, Les Misérables
Pour la soif, dit-il, en la mettant dans sa poche. A force d'aller en avant, il parvint au point où le brouillard de la fusillade devenait transparent. Si bien que les tirailleurs de la ligne rangés et à l'affût derrière leur levée de pavés, et les tirailleurs de la banlieue massés à l'angle de la rue, se montrèrent soudainement quelque chose qui remuait dans la fumée. Au moment où Gavroche débarrassait de ses cartouches un sergent gisant près d'une borne, une balle frappa le cadavre.
Fichtre! Fit Gavroche. Voilà qu'on me tue mes morts. Une deuxième balle fit étinceler le pavé à côté de lui. Une troisième renversa som panier. Gavroche regarda, et vit que cela venait de la banlieue. Il se dressa tout droit, debout, les cheveux au vent, les mains sur les hanches, l'oeil fixé sur les gardes nationaux qui tiraient, et il chanta :
On est laid à Nanterre, C'est la faute à Voltaire, Et bête à Palaiseau, C'est la faute à Rousseau.
Puis il ramassa son panier, y remit, sans en perdre une seue, les cartouches qui en étaient tombées, et, avançant encore vers la fusillade, alla dépouiller une autre giberne. Là une quatrième balle le manqua encore. Gavroche chanta :
Je ne suis pas notaire, C'est la faute à Voltaire, Je suis petit oiseau, C'est la fute à Rousseau.
Une cinquième balle ne réussit qu'à tiré de lui un troisième couplet :
Joie est mon caractère, C'est la faute à Voltaire, Misère est mon trousseau, C'est la faute à Rousseau.
Cela continua ainsi quelque temps. Le spectacle