Après la censure de « Tartuffe » dès le premier spectacle car jugée inacceptable par l’Eglise, Molière a besoin d’une nouvelle œuvre pour renflouer les caisses de sa troupe et s’inspire pour cela d’un personnage mis à la mode par l’espagnol Tirso de Molina avec l’écriture de « Dom Juan ». Le personnage dont le titre de l’œuvre est éponyme n’a qu’un rêve : aimer les femmes, les posséder toutes. Il consacre sa vie à ce jeu cruel, il va jusqu’à tuer pour satisfaire son désir. Il le présente comme un grand Seigneur, impie, débauché, libertin qui finit par recevoir le châtiment de la justice divine. En 1665, il présente pour la première fois la tragi-comédie en cinq actes et en prose au théâtre du palais royal. Cependant, l’Eglise continue d’exercer son pouvoir, elle exige d’abord des coupes dans le texte et finit pas à pas à interdire la censurer entièrement. « Dom Juan » est reconnu comme l’œuvre majeure de Molière. La scène d’exposition de la pièce est très représentative de l’œuvre. Elle se constitue d’un dialogue entre Sganarelle et Gusman, respectivement valets de Dom Juan et son épouse actuelle, Dona Elvire. En quoi cette scène nous donne un aperçu de l’œuvre elle-même ? Pour répondre à cette question, nous verrons comment à travers les tirades de Sganarelle, Molière nous expose le côté avant-gardiste de la pièce puis quel portrait est peint du personnage principal.

Le fait que la scène s’ouvre sur Sganarelle, un valet n’est pas ordinaire en soi. C’est un premier indice quant au caractère particulier de la pièce. La tirade de ce personnage a pour sujet principal le tabac, mais plus encore, il en fait l’éloge. Il est nécessaire de savoir qu’à l’époque de la pièce, le tabac est interdit par l’Eglise à cause de ses effets hallucinogènes, c’est un luxe auquel les petites gens n’ont pas accès. Qu’un valet en parle avec autant de louanges est assez originale. Sganarelle accumule les erreurs dans son discours avec un air suffisant qui se veut intelligent ce qui