Commentaire Michaux

324 mots 2 pages
Texte C: Un Barbare en Asie, Henri Michaux, 1933Là où ses besoins finissent, l'Européen se repose, mais l'Hindou n'a pas de besoins. Il fait un repas aussi bien que trois, un jour il mange à midi, le lendemain à sept heures; il dort quand ça se trouve et où il se trouve, sur une couverture posée sur le sol.
En fait de misères et de dénuement on ne l'étonnera jamais.
II faut voir les hôtels qu'il y a chez eux. Diogène faisait l'original parce qu'il habitait un tonneau.
Bon! mais jamais il ne songea à le louer à une famille, ou à des voyageurs de Smyrne, ou à le partager avec des amis.
Eh bien! dans un hôtel indien, on vous donne une chambre où il y a place seulement pour une paire de pantoufles. Un chien qu'on y logerait étoufferait. Mais l'Hindou n'étouffe pas. Il s'arrange avec le volume d'air qu'on lui donne.
Le confort le dérange. Il lui est hostile. Si le peuple qui l'a conquis n'était pas un peuple aussi fermé que l'anglais, l'Hindou l'aurait rendu honteux de son confort.
En fait de souffrance on n'étonne pas davantage l'Hindou.
Un aveugle pauvre en Europe excite déjà une compassion notable. Aux Indes, qu'il ne compte pas sur sa cécité pour émouvoir. Non, qu'il ajoute à sa cécité, des genoux broyés, un bras coupé, ou tout au moins la main, et qu'elle soit sanguinolente autant que possible, puis une jambe de moins et le nez rongé, cela va de soi. Un peu de danse de Saint-Guy dans ce qui reste, alors peut-être il pourra se présenter utilement. On comprendra que sa situation laisse à désirer, et qu'un petit sou lui fera plaisir. Mais ce n'est pas sûr. Ces spectacles sont tellement ordinaires, tellement nombreux. Il y a des maigreurs telles qu'on se demande si elles viennent de l'homme ou si elles ne viennent pas du

en relation