Commentaire pyrrhus
Racine connaît son premier grand succès théâtral avec Andromaque, tragédie que le roi applaudit lors de sa première représentation le 19 novembre 1667. Cette pièce met en scène un épisode de l’histoire antique : le roi d’Épire, Pyrrhus, s’éprend d’Andromaque, la veuve d’Hector. Aveuglé par la passion, il rompt ses engagements auprès des Grecs, décide d’épouser la captive et, plus grave encore, d’épargner le fils de cette dernière, l’ultime rejeton des Troyens vaincus. Dans la scène 7 de l’acte III, au tournant de la pièce, Pyrrhus quitte son masque de roi vengeur pour déclarer son amour à Andromaque. Pour persuader la veuve d’Hector, qui a juré fidélité à mari, de l’épouser, il lui offre de laisser la vie sauve à son fils en échange de sa main. Nous verrons, en étudiant cette tirade, quel est le statut de Pyrrhus qui règne et se soumet à la fois, puis nous analyserons les strat1ki qu’il met en place pour séduire Andromaque.
[I - Pyrrhus, la puissance et la faiblesse]
[A. Un ennemi puissant]
Pyrrhus se présente à sa captive en roi tout puissant. Ainsi, il a le pouvoir de la parole et prononce une longue tirade sans être interrompu. Andromaque n’a pas la possibilité de lui couper la parole ou de se révolter. Elle ne peut qu’attendre la fin de la réplique. Cette dernière porte d’ailleurs la marque d’un homme habitué à donner des ordres à se faire obéir. Il emploie l’impératif (« demeurez », v. 1, « Voyez », v. 7, « sauvez », v. 14, « Songez », v. 27), des modalisateurs injonctifs (« il faut ») ou encore le futur de certitude qui suggère que rien ne peut s’opposer à sa volonté (« je viendrai vous prendre », v. 27, « vous me verrez », v. 29). L’emploi de la tournure impersonnelle « On peut » fait entendre la voix de celui dont les désirs et les volontés deviennent des actes de lois. Le roi s’impose donc d’abord par la parole. De plus, Pyrrhus rappelle à son auditrice que sa victoire sur Troie lui a donné sur elle un pouvoir absolu. Le champ