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Marc Gontard, Université de Rennes-2 Le roman marocain de langue française, avec une centaine de titres publiés , forme aujourd’hui un ensemble nettement repérable, au sein de la littérature maghrébine, de sorte qu’il est possible, avec un demi-siècle de recul, de mieux comprendre son émergence et son évolution, en relation avec l’histoire politique et sociale du pays. Or cette évolution affecte non seulement la thématique des oeuvres mais aussi et surtout les dispositifs narratifs par lesquels le sens vient à l’écriture.
De l’Exotisme colonial à l’expression identitaire
Depuis l’établissement du Protectorat en 1912, jusque dans les années 50, la littérature de langue française au Maroc reste exclusivement une littérature française sur le Maroc. Le roman marocain, proprement dit, apparaît donc à la même époque et dans les mêmes conditions qu’en Algérie : dans le sillage de la littérature coloniale. Ce qui explique l’ambivalence de la critique à l’égard du premier roman d’Ahmed Sefrioui : La Boîte à merveilles (1954).
A sa naissance, le roman marocain de langue française est en effet un roman de transition qui tente de donner de la réalité socio-culturelle une vision de l’intérieur en opposition avec les représentations mythiques et idéologiques des écrivains français, voyageurs (Loti, Les frères Tharaud, Camille Mauclair, Henri Bordeaux, Robert Brasillach) ou résidents (Paul Odinot, Maurice Le Glay). Mais la littérature coloniale a eu aussi ses auteurs progressistes et François Bonjean, par exemple (Confidences d’une fille de la nuit, 1939, Reine Yza amoureuse,1947) a sans doute été l’un des modèles de Sefrioui dont il fut le professeur à Fes, puisqu’il lui préfaça son premier livre, tandis que Sefrioui écrivit à son tour la préface d’une réédition marocaine de Bonjean en 1968.
Ce qui frappe donc, dans le premier roman de Sefrioui, c’est un mimétisme du récit qui, par le biais de l’autofiction, s’attache à