Conflit social algérie 2011
2803 mots
12 pages
Entretien réalisé par Hani M. Le Soir d’Algérie : Depuis quelque temps, l’Algérie est le théâtre d’une flambée de mouvements de contestation sociale. Le phénomène du conflit social s’est installé avec une envergure et une constance qu’il n’a jamais eues depuis l’accession du pays à son indépendance politique. Quel commentaire cela vous inspire-t-il ? Mohamed Bouchakour : Effectivement, nous sommes bel et bien face à quelque chose d’inédit. Un débat sérieux et serein est devenu urgent si l’on tient à prendre du recul et comprendre ce qui nous arrive. Je voudrais à ce propos commencer par faire deux commentaires. Tout d’abord, il faut admettre que le phénomène du conflit est partout présent dans le règne du vivant. A ce titre, il est indissociable de la condition humaine. Même lorsqu’il ne se manifeste pas de manière déclarée, son potentiel est là, en germes. L’Algérie ne saurait y échapper. C’est là une donnée qu’il faut bien garder à l’esprit, car on a souvent pensé qu’au nom de la spécificité algérienne, notre pays pouvait échapper à des lois universelles. Ce qui varie selon les pays, et qui fait justement la spécificité de chacun, c’est plutôt la manière dont le conflit social est géré. Et là, tout dépend de la culture politique dominante et du degré de modernité atteint par la fonction managériale. Ce point de différenciation me conduit à mon second commentaire. La réflexion scientifique sur le conflit a donné lieu à énormément de travaux depuis ses débuts à la fin du 19e siècle.
Il en ressort globalement deux grandes conceptions qui prennent le contre-pied l’une de l’autre.
- La première, consacrée par le taylorisme pose que le conflit est un phénomène nocif. Il occasionne des dysfonctionnements et des gaspillages de ressources. En déstabilisant l’organisation, il est porteur de tous les périls et peut même menacer sa survie. Dans cette conception dite du