Couleur
Quand on évoque les grandes villas de Le Corbusier construites dans les années 20-30, les images qui viennent à l’esprit ne paraissent avoir qu’un lointain rapport avec la couleur. C’est plutôt la blancheur immaculée de leurs façades qui saute aux yeux. Mais ne s’agirait-il pas là d’un leurre ? L’architecte, au contact intellectuel des avant-gardes plastiques de son temps propose des pavillons au purisme revendiqué (tranchant des lignes, simplicité constructive) mais qui, intérieurement, révèlent d’étonnants contrastes, dont celui blancheur / couleur n’est pas le moindre. Conçues sur le mode de la promenade architecturale, ces villas offrent à notre regard un enchaînement de véritables espaces picturaux, des « Mondrian en trois dimensions ». Il n’y a qu’à voir la galerie de la Villa La Roche (1923), pour comprendre que l’espace tend vers l’abstraction (la fameuse décomposition « point, ligne, plan » théorisée par Kandinsky) : un agencement de parois colorées dynamiques, où la disposition de la couleur (sur les parois comme sur le mobilier) participe de la profondeur comme de l’équilibre de l’espace. Les gammes choisies évoquent les couleurs primaires, mais visent plutôt la douceur, l’atténuation, le demi-ton, pour donner des reflets teintés à la généreuse lumière qui en devient ainsi un guide pour le visiteur.
36 ans (et une guerre mondiale) plus tard. La dernière période corbuséenne semble se placer aux antipodes de cet idéalisme épuré. Finie la douceur du purisme, l’architecte revendique le choc du brutalisme. Fidélité pourtant au matériau béton, à sa plasticité, à son économie, mais choix d’une toute autre expression : adieu blancheur, pureté et discrétion, place aux bâtiments sculptures, indéniablement expressifs mais rugueux voire