Cours droit privé
Licence 1 – Semestre 1
Ouverture : Le travail de juriste
1) La nécessité des théories
Le juriste n’est pas une femme ou un homme de la mémoire, même s’il lui en faut, bien sûr comme pour toute activité. C’est avant tout une femme ou un homme de la pensée. Pour bien travailler juridiquement, il ne faut pas d’abord se souvenir de ses textes, mais avant toute chose réfléchir à un ou plusieurs problèmes afin de donner une ou des solutions praticables. C’est un acte difficile de l’intelligence pratique.
L’activité principale des juristes est d’apporter à des situations concrètes des réponses pratiques (exemples). Mais ses réponses, le juriste est contraint de les justifier. Il ne peut se borner à affirmer : voilà la solution, il doit aussi expliquer, pourquoi cette solution lui paraît juste (au sens de la justesse – c’est « correct » – comme, dans la mesure du possible, au sens de la justice – c’est « bien »).
Selon une vision très triviale mais, malheureusement, trop largement répandue (même chez les juristes eux-mêmes), pour apporter la solution juridique « juste », il suffit d’appliquer la loi (ou le règlement, ou la Constitution, bref les textes applicables). On suppose alors que la loi ou le texte juridique, quel qu’il soit, contient d’avance la solution au problème.
Mais on confond, ce faisant, le travail du gendarme et le travail du juriste. Le texte juridique que connaît (à peu près et plus du tout lorsqu’il circule à vélo) le jeune étudiant en droit, c’est le code de la route. On lui inculque le code en le faisant répondre par oui/non. Le feu est rouge : je stoppe. Le feu est vert : je démarre.
D’où la représentation commune selon laquelle le droit vous dit à chaque fois : c’est oui (démarre) ou c’est non (stoppe) ; tu peux ou tu ne peux pas. Le texte vous dit ce que vous pouvez faire et ce que vous ne devez pas faire. Alors c’est simple, il suffit de comprendre le signal que vous donne le texte (ou le dispositif de