Critique de la negritude
Pour les europeens la Négritude a procédé à la représentation d’un homme, qu’il a appelé le Noir, magnanime, bon, sans défauts, en harmonie avec lui-même et la nature, un homme créé pour ne pas faire du mal, ne pas souffrir, jusqu’à l’avènement du méchant serpent, le jaloux destructeur, le Blanc. On crie à hue et à dia sur l’homme Blanc méchant, avide, insatiable, corrompu, qui ne vit que pour piller l’homme noir bien,impartial,clement Le mouvement fut ainsi détourné de son objectif original, transformé du cri du cœur, du cri humain qu’il était censé être en une mélopée idéaliste, verbeuse et creuse. N’était-ce sûrement pas le danger que portait en lui ce mouvement chargé de trop d’émotions que le Prix Nobel nigérian Wolé Soyinka, l’un de ses premiers détracteurs, percevait en écrivant « Le Tigre ne crie pas sa tigritude, il bondit sur sa proie et la dévore
Pou lui la Négritude n’a pas pu rester fidèle à son ancêtre le mouvement culturel La Renaissance de Harlem des années vingt dont l’un des chantres, Langston Hughes, écrivait en 1926 dans l’hebdomadaire américain The Nation, le texte intitulé The Negro Artist and the Racial Mountain où l’on retrouve l’une de ses plus célèbres formules « Les jeunes artistes nègres créent aujourd’hui dans le but d’exprimer notre propre peau noire, à notre manière, sans peur, ni honte. Si les Blancs sont satisfaits, nous sommes ravis. S’ils ne le sont pas ça n’a pas d’importance. Nous savons que nous sommes beaux. Et laids à la fois. » Et justement, la Négritude n’a pas cherché à explorer la laideur de l’homme noir, dépossédant ainsi ce dernier de son humanité.
Les œuvres de la Négritude, du moins la plupart, ont créé des personnages noirs tellement bons et complets qu’ils ne ressemblent pas à des humains. Et ces personnages n’existent, ne peuvent exister nulle part ailleurs que dans ces livres. La nature humaine est caractérisée par sa complexité et ses contradictions. Le pauvre petit boy noir