Critique littéraire
« Apparaître, poindre, briller. Consteller, scintiller, s'éteindre. »
En ouvrant ce petit livre bleu et violet sans réel prétention, nous nous sentons rapidement aspirés dans les mystères d'un voyage aujourd'hui oublié des mémoires, un périple presque magique, dans une ambiance qui oscille entre pure clarté et nuit profonde. Mélange habile de légende contée et de faits réels,ce roman est une exploration à la fois du travail d'artiste, de l'histoire et des amours perdus.
Le récit se déroule tel un conte des Milles et un nuits, remplie d'images, d'odeurs, de sons, de sensations. Le lecteur déplie délicatement les quelques pages retraçant cette expédition merveilleuse qui a marqué le renouveau d'un artiste de génie, Michel-Ange, tel un un ouvrage laissé depuis des siècles sous la poussière.
En brefs chapitres Mathias Enard nous laisse savourer la perle de ses mots délicats, nous entraînant dans des réflexions sur l'art de créer, la mort, l'amitié, l'amour, les différences culturelles, la religion, les peurs humaines. Au son des accents étrangers, du chant du muezzin en haut des minarets, de l'activité de la ville, nous explorons Constantinople où même la lumière, les couleurs et les senteurs sont différentes de nos contrées. Et nous nous laissons prendre aux rêves, tout comme Michel-Ange, qui hésitera entre fascination et répulsion face au monde ottoman qu'il ne comprend pas. Un rêve qui ne veut pas s'éteindre, qui veut continuer à briller telle une étoile. Un lien puissant nous lie à la lecture du premier chapitre, qui ne se brise qu'une fois le roman terminé, tel un charme étrange mais captivant.
« Puisque ce sont des enfants, parle-leur de batailles et de roi, de chevaux, de diables, d'éléphants et d'anges, mais n'omets pas de leur parler d'amour et choses semblables ». La citation de Kipling à l'origine du titre de ce fabuleux roman résume à elle seule cette histoire qui se présente