Cyrano de bergerac
L’Autre Monde
La polysémie du titre
« L’autre monde » est toujours le monde d’après, toujours à portée de voyage. C’est tout d’abord le « Nouveau monde » du Canada dans lequel Dyrcona rencontre des hommes sauvages ; puis le Paradis terrestre où l’homme d’un livre fait la connaissance de quelques « hommes » du Livre ; et le monde de la Lune entre les cages autoritaires des Séléniens (des « hommes-bêtes ») et les libres pensées d’une espèce de cabinet libertin ; et, après un bref retour dans les prisons terrestres (ne serait-ce que pour montrer que l’homme vit sans cesse emprisonné – aliéné – physiquement, moralement ou mentalement), une macule isolée avant de parcourir les routes solaires sous le règne des Oiseaux, sous une forêt de chênes parlants et en quête du domaine des philosophes – lorsque le récit n’est pas troublé par l’apparition d’un habitant d’un « autre monde » encore. De monde en monde, d’autre en autre, de prison en libre pensée, ce récit, en suggérant l’infini, fait appel à la relativité. « L’autre monde » n’est pas à rejeter uniquement parce qu’il est autre, de même que l’autre homme n’est pas à condamner parce qu’il est différent, par son opinion ou par son apparence. Il faut faire preuve d’altruisme, ici comme ailleurs.
L’auteur semble prendre ses distances avec l’Homme comme pour mieux l'observer, plus objectivement. Il l’analyse de l’extérieur comme s’il était étranger à lui-même en étudiant les différentes caractéristiques humaines sous des points de vue différents. Par conséquent, « l’autre monde », c’est aussi le microcosme humain : ses sociétés, ses pensées, ses croyances, ses désirs, ses moyens de communication, son corps, etc. C’est pourquoi cette œuvre romanesque est placée sous le sceau de l’étrangeté : parce qu’elle offre une nouvelle perspective, plus surprenante, de l’Homme. L’altérité – la monstruosité parfois comme dans le cas des Séléniens mi-homme mi-bête – est naturellement étrange, car elle