Sur de nombreux points, tabagisme et cinéma en ont en commun.
Tandis que la salle devient noire, attendant les premières lumières du projecteur, le briquet s’allume pour laisser échapper la fumée bleutée sortant de la cigarette; le blanc immaculé de l’écran se barbouille d’autres couleurs, formant des images; la volute qui sort de notre bouche arbore une autre chromatique: ce fameux jaune très pâle quasi imperceptible qui, au fil de l’histoire, prends de la place, s'épand jusqu’ à disparaître: le noir revient, les rideaux se ferment. Apparus puis démocratisés dans la même époque, ceux-ci sont complémentaires. N’est-ce pas grâce à la fumée sortant de la cheminée du train de la gare de La Ciotat que le premier film tourné par ces deux génies de frères, portant bien le nom de Lumière, que celui-ci parut si réaliste? Répondre non serait égoïste, car par cette vapeur, les deux frères venait de réaliser quelque chose que peut-être ils n’avaient pas compris: ils ont montré un mouvement autrement que par la réalité propre et du même coup cette réalité gagne un dimension merveilleuse.

Comme dit en introduction, la première fumée est apparue dans la première image en mouvement. Mais celle-ci, épaisse et opaque, amena à une fumée beaucoup moins apparente, beaucoup plus fine, mais toujours aussi présente, celle de la cigarette. Fumer au cinéma est une utopie: ça n’a pas d’odeur et ne pique pas

les yeux, l’odeur n’imprègne jamais les vêtements, la cigarette ne fait pas cracher, ne donne pas mauvaise haleine, ne tachera jamais les dents et elle ne tue que de façon extrêmement rare. Donc, le tabac n’est qu’une image mais cette image, cette volute, si elle est bien domptée, sert à créer une allure, comme le fameux cigare de Groucho Marx ou l’inévitable pipe de Sherlock Holmes. Ainsi, le tabac est une “machine à mythologie”, qui travaille les profils d’acteurs mais aussi de certains réalisateurs, tel qu’ Alfred Hitchcock. Cependant, les simples gestes qui amènent à ce