De la Cruauté
De la Cruauté
Essai à la manière de Michel de Montaigne
Département de philosophie
De la cruauté
Beaucoup d’entre nous connaissent ce sentiment bien étrange et ambivalent se terrant au plus profond de notre être sensible. Il m’apparait, à bien y penser, que la plupart ne peuvent le confronter, étant immédiatement épeurés par leur propre monstruosité, leur tendance déviante. La cruauté, bien qu’elle puisse s’exprimer sous de multiples visages, de manières variées et puiser ses forces dans des passions diverses, est inconditionnellement un acte entraînant une certaine souffrance chez autrui.
Ainsi, je me perds dans des dédales de souvenirs quelque peu rebutants lorsque je tente de trouver l’origine de ce penchant vicieux. Il est facile de se rappeler de cet enfant à la garderie que le groupe tyrannisait en raison de son surplus de poids. Pour ma part, je suis certain que mes géniteurs ne m’ont pas enseigné ces comportements, c’est dire que la seule avenue qui se profile devant mon esprit est celle de l’aspect ontogénétiquement inné de la cruauté.
Serai-je capable d’imiter le Marquis de Sade, qui confronta sa cruauté et proclama haut et fort la fascination et le plaisir malin que lui apportait la douleur de l’autre? Sans doute mon inclinaison n’est pas aussi prononcée que celle de cet homme excentrique. N’empêche que je me surprends à me délecter de la souffrance de mes ennemis comme on savoure un bon vin. Pire. N’est-il pas commun d’éprouver une douce satisfaction quand un malheur arrive à un de nos amis, et qu’il nous prouve notre supériorité sur cet être aimé?
De tous temps, les hommes s’encouragèrent collectivement à accepter leur cruauté. Je ne peux rester insensible à la pensée de cette arène romaine remplie d’un amalgame social, déchaînant ses passions intériorisées contre les pauvres diables se faisant dévorer par les lions. Plus récemment, les décapitations d’Occidentaux par l’État Islamique ont de quoi me glacer le