De verlaine – vers de laine
2641 mots
11 pages
Prince des poètes et poète maudit, prisonnier et professeur, père de famille et homosexuel, débauché et catholique – si c’est effectivement de la voyance que naît l’inspiration poétique, Paul Verlaine incarne la poésie même, car il a tout vu, tout vécu. L’histoire de sa vie nous a procuré des millers et millers de pages biographiques ; celle de son âme – cinq tomes volumineux : prose, poésie, théâtre, même pornographie. Aura tort pourtant celui qui voudra – par paresse ou lassitude – séparer ces deux domaines, puisque l’oeuvre verlainienne ne peut être perçue qu’à travers ses expériences et que c’est seulement en combinant les deux qu’on arrive à déchiffrer – autant qu’il est possible de déchiffrer un génie – le message de Pauvre Lelian. Né à Metz en 1844, choyé, voire gâté par sa mère, petit Paul-Marie avait, comme lui-même le confesse dans son autoportrait railleur, une enfance hereuse. Depuis ses quatorze ans, il avait rimé à mort, faisant des choses vraiement drôles dans le genre obscéno-macabre . Déjà pendant ses études à Paris, il manifestait une attitude fortement nonchalante – inscrit en droit, il a très vite compris que la vraie vie se déroulait ailleurs ; à force de fréquenter les cafés du cercle poétique, il a commencé à sécher les cours et, par la suite, rompu avec l’éducation traditionnelle. Et paradoxalement, c’est justement à cause de quitter Alma Mater qu’il a obtenu sa licence – licence poétique : en 1866, le Parnasse Contemporain publie ses poèmes ; quelques mois plus tard, apparaît (à compte d’auteur) son premier recueil, accueilli par Anatole France et Mallarmé : Poèmes saturniens. Le grand voyage est désormais entrepris. La parution des Fêtes galantes en 1869 coïncide avec la rencontre de Mathilde Mauté. Verlaine – déjà abusant de l’absinthe, ce nectar du XIXe siècle – lui fait la cour toute l’année, pour la conduire finalement à l’autel le 11 août 1870. Le bonheur conjugal ne durera point, malgré le témoignage de l’amour rendu dans la