Deleuze et les lignes
Dialogues est un recueil d'entretiens entre Gilles Deleuze et son ancienne étudiante et amie Claire Parnet édité en 1977 chez Flammarion. Ce livre frappe d'abord par sa forme. Le régime ordinaire des entretiens, qui consiste en une succession de questions/réponses, d'un échanges à au moins deux voix, est entièrement subverti pour laisser place à une écriture continue, linéaire, en apparence monophonique, que Deleuze compare au tracé d'un devenir (cf. page 8 : « Ce pourrait être ça, un entretien, simplement le tracé d'un devenir »). Le locuteur est donc indiscernable dans une certaine mesure, il s'agit d'un dialogue entre deux âmes. Qui interroge, qui affirme, qui parle ? On ne sait jamais bien. Mais, à la différence des ouvrages écrits en collaboration avec Guattari, les deux intervenants n'ont pas le même statut, Claire Parnet se contentant de jouer le rôle d'interlocuteur. C'est donc Deleuze qui parle dans ce livre, et c'est de sa philosophie qu'il va être question. Ce texte nous semble intéressant par la vue synoptique qu'il propose du concept deleuzo-guattarien de ligne. Le texte en effet que nous allons commenter est extrait du tout début de la première partie du chapitre IV, intitulé « Politiques », où il est question des lignes, anticipant de ce fait sur les analyses de Mille Plateaux (1980, Editions de Minuit. cf. essentiellement le neuvième plateau, qui s'intitule « 1933 - Micropolitique et segmentarité » et qui est consacré à cette étude des lignes). Il