Demain dès l'aube analyse
désespoir. À la veille du quatrième anniversaire de l'accident, Hugo compose ces trois strophes d'une simplicité harmonieuse et d'un
lyrisme touchant. Avec une détermination qui n'exclut ni l'émotion ni l'imagination, il décrit par avance le cheminement qui le conduira
auprès de son enfant bien-aimé. Mais par la magie des images, des rythmes et par le charme du langage poétique, ce voyage vers le
souvenir et vers la mort prend la forme d'un poème d'amour et d'une célébration. Léopoldine disparue revivra éternellement grâce à
l'offrande de quelques fleurs. Hugo illustre ici le pouvoir de la poésie, immortaliser ce que la mort a fait disparaître.
Demain dès l'aube
Demain, dès l'aube, à l'heure où blanchit la campagne,
Je partirai. Vois-tu, je sais que tu m'attends.
J'irai par la forêt, j'irai par la montagne.
Je ne puis demeurer loin de toi plus longtemps.
Je marcherai les yeux fixés sur mes pensées,
Sans rien voir au dehors, sans entendre aucun bruit,
Seul, inconnu, le dos courbé, les mains croisées,
Triste, et le jour pour moi sera comme la nuit.
Je ne regarderai ni l'or du soir qui tombe,
Ni les voiles au loin descendant vers Harfleur,
Et quand j'arriverai, je mettrai sur ta tombe
Un bouquet de houx vert et de bruyère en fleur.
I. Le voyage symbolique
La structure du poème souligne une double progression dans le temps et dans l'espace, et un itinéraire mené avec détermination.
a) La progression dans le temps
Le poème débute par l'indication insistante du moment du départ (tout le vers 1 : trois notations de temps formant un groupe ternaire selon le rythme 2/2/8). Il se termine au crépuscule comme le souligne la métaphore du vers 9 ("l'or du soir qui tombe"). Le voyage occupe ainsi une journée entière sans interruption, à travers un paysage aux aspects variés.
b) La progression