Devant la souffrance des autres, silence !
Sujet délicat: qui peut se donner l’autorisation de parler sur la souffrance?
Faut-il en avoir été blessé soi-même pour avoir le droit d’en parler?
Il est vrai qu’il y a toujours un peu de gaucherie quand quelqu’un qui n’a jamais souffert se permet de parler du sujet.
Mais faut-il pour autant se refuser d’en parler?
Les gens en santé comme les gens heureux ont besoin d’apprivoiser ce qui, tôt ou tard, surgira dans leur vie.
C’est en y pensant, en en parlant qu’ils rendent le sujet familier sans pour autant le rendre agréable.
Le discours le plus juste sur la souffrance, c’est le silence.
Se taire parce que les mots ne sont pas assez justes pour exprimer la douleur ou le malheur. Se taire parce que les paroles deviennent indiscrètes comme si elles avaient de la supériorité et cherchaient à contrôler ce qui se passe.
La souffrance, bien souvent, ressemble à un animal sauvage.
Le dompteur de lion y va avec précaution.
Il ne fait pas de faux mouvement.
Il respecte la bête devant lui.
Il compose avec elle.
Ainsi en est-il de la souffrance.
Elle se dresse devant soi avec toute son arrogance.
Et personne ne la mate en crânant.
La tentation est forte de sortir de la cage et de fuir.
Mais la souffrance ne se fuit pas.
Elle s’accroche, s’agrippe comme sangsue.
Quiconque veut maîtriser la souffrance doit se résoudre à demeurer devant elle, à la fixer du regard.
Le regard qui change la souffrance, mais surtout le regard qui change lui-même en se portant sur la souffrance.
Essayer de comprendre, chercher un sens à ce qui n’en a pas en soi.
Plus globalement, découvrir le prix de la vie.
La souffrance, si elle a un côté positif, purifie le regard sur la vie.
Elle en fait s’exprimer toute la densité.
Mais le mal de vivre, le désir de mourir pour en finir, c’est peut-être la souffrance la plus brutale qui existe.
La souffrance corporelle, on parvient à la localiser.
Mais la douleur intérieure.
La souffrance ne se