Diderot le rever de d'alembert dialougue entre bordeau et mlle de l'espinasse
(1773)
Dialogue
Diderot se plaît à évoquer ses souvenirs de famille. Il met en scène son père (homme d'une droiture méticuleuse). sa sœur, son frère prêtre et lui-même. Par un soir d'hiver, au coin du feu, le père confie à ses enfants un épisode de sa vie qui mit sa conscience dans un cruel embarras. À la mort du curé centenaire de Thivet, le narrateur de l'histoire avait été appelé par les parents, fort pauvres, du défunt, afin d'être l'arbitre de la succession qui, selon toute vraisemblance, devait leur appartenir. Pendant la nuit, en dépouillant les papiers du curé, le narrateur avait trouvé un testament écrit en faveur d'un riche libraire parisien (Frémin). Le document, très vieux, désignait, comme exécuteurs testamentaires, des personnes mortes depuis plus de vingt ans. Tout laissait supposer que le curé, au cours de sa longue vie, avait oublié ce testament et, entre-temps, avait changé d'idée. Le conteur avoue avoir été tout de suite tenté de brûler le testament qui enlevait tant d'espoir à de pauvres gens, au profit d'un homme riche et sans besoins. Ne sachant que décider, il avait fini par demander l'avis d'un père oratorien qu'il connaissait, sophiste très distingué, qui lui avait conseillé de respecter le testament. Il fit ainsi, mais le désespoir de ces malheureux si déçus et la dureté du riche héritier, à qui l'on avait vainement demandé de renoncer à l'héritage, n'avaient pas été sans vivement l'impressionner; à tel point que ce souvenir le faisait encore souffrir après bien des années.
Sur cet épisode se greffe naturellement une discussion, au cours de laquelle Diderot, sans manquer au respect que lui inspire l'autorité paternelle, ne cache pas son opinion : il eût certes agi à l'opposé de ce qu'avait conseillé le père oratorien. Le même soir, au cours de la veillée familiale, voici que se présente un ouvrier chapelier, accompagné d'un ami du père de Diderot