Diderot, le supplement au voyage de bougainville, 1772 ii, “discourt du vieillard tahitien”

873 mots 4 pages
Diderot, LE SUPPLEMENT AU VOYAGE DE BOUGAINVILLE, 1772 II, “DISCOURT DU VIEILLARD TAHITIEN”

Texte étudié:

C'est un vieillard qui parle. Il était père d'une famille nombreuse. A l'arrivée des Européens, il laissa tomber des regards de dédain sur eux, sans marquer ni étonnement, ni frayeur, ni curiosité. Ils l'abordèrent ; il leur tourna le dos et se retira dans sa cabane son silence et son souci ne décelaient que trop sa pensée : il gémissait en lui-même sur les beaux jours de son pays éclipsés. Au départ de Bougainville, lorsque les habitants accouraient en foule sur le rivage, s'attachaient à ses vêtements, serraient ses camarades entre leurs bras, et pleuraient, ce vieillard s'avança d'un air sévère, et dit pleurez, malheureux Tahitiens ! pleurez ; mais que ce soit de l'arrivée, et non du départ de ces hommes ambitieux et méchants : un jour, vous les connaîtrez mieux. Un jour, ils reviendront, le morceau de bois que vous voyez attaché à la ceinture de celui-ci, dans une main, et le fer qui pend au côté de celui-là, dans l'autre, vous enchaîner, vous gorger, ou vous assujettir à leurs extravagances et à leurs vices ; un jour vous servirez sous eux, aussi corrompus, aussi vils, aussi malheureux qu'eux. Mais je me console ; je touche à la fin de ma carrière ; et la calamité que je vous annonce, je ne la verrai point. O tahitiens ! mes amis ! vous auriez mi moyen d'échapper à un funeste avenir ; mais aimerai mieux mourir que de vous en donner le conseil. Qu'ils s'éloignent, et qu'ils vivent.

Puis s'adressant à Bougainville, il ajouta : Et toi, chef des brigands qui t'obéissent, écarte promptement ton vaisseau de notre rive : nous sommes innocents, nous sommes heureux ; et tu ne peux que nuire à notre bonheur. Nous suivons le pur instinct de la nature ; et tu as tenté d'effacer de nos âmes son caractère. Ici tout est à tous et tu nous as prêché je ne sais quelle distinction du tien et du mien. Nos filles et nos femmes nous sont communes ; tu as partagé ce

en relation

  • La nature selon sa nature
    1095 mots | 5 pages
  • Topos fenetre
    308 mots | 2 pages
  • Commentaire de bougainville. le regard que portent les voyageurs sur tahiti et la présentation des tahitiennes est ambigu.
    435 mots | 2 pages
  • Anglais
    567 mots | 3 pages
  • La fontaine l'huitre et les plaideurs
    303 mots | 2 pages
  • Dissertation : l’amour en plus d’elisabeth badinter
    1521 mots | 7 pages
  • Victor hugo s'adresse a l'assemblée.
    488 mots | 2 pages
  • Explication de texte : "je ne vois dans l'animal qu'une machine ingénieuse [...] la nature se tait."
    959 mots | 4 pages
  • etude de marché cosmétique
    1787 mots | 8 pages
  • Diderot-supplement au voyage de bougainville
    3208 mots | 13 pages
  • Chapitre 2 supplément voyage de bougainville
    2192 mots | 9 pages
  • L'idée de loi naturelle a-t-elle encore un sens?
    1116 mots | 5 pages
  • jfgjdftgfbsfb
    338 mots | 2 pages
  • La jondrette
    415 mots | 2 pages
  • Est on maître de soi
    2645 mots | 11 pages