Dido
LETTRE SUR LE COMMERCE DE LA LIBRAIRIE
Lettre historique et politique adressée à un magistrat sur le commerce de la librairie, son état ancien et actuel, ses réglements, ses privilèges, les permissions tacites, les censeurs, les colporteurs, le passage des ponts et autres objets relatifs a la police
Vous désirez, monsieur, de connaître mes idées sur une affaire qui vous paraît très importante, et qui l´est. Je suis trop flatté de cette confiance pour ne pas y répondre avec la promptitude que vous exigez et l´impartialité que vous êtes en droit d´attendre d´un homme de mon caractère. Vous me croyez instruit, et j´ai en effet les connaissances que donne une expérience journalière, sans compter la persuasion scrupuleuse où je suis que la bonne foi ne suffit pas toujours pour excuser des erreurs. Je pense sincèrement que dans les discussions qui tiennent au bien général, il serait plus à propos de se taire que de s´exposer, avec les intentions les meilleures, à remplir l´esprit d´un magistrat d´idées fausses et pernicieuses.
Je vous dirai donc d´abord qu´il ne s´agit pas simplement ici des intérêts d´une communauté. Eh ! que m´importe qu´il y ait une communauté de plus ou de moins, à moi qui suis un des plus zélés partisans de la liberté prise sous l´acception la plus étendue, qui souffre avec chagrin de voir le dernier des talents gêné dans son exercice, une industrie, des bras donnés par la nature, et liés par des conventions, qui ai de tout temps été convaincu que les corporations étaient injustes et funestes, et qui en regarderais l´abolissement entier et absolu comme un pas vers un gouvernement plus sage ?
Ce dont il s´agit, c´est d´examiner, dans l´état où sont les choses et même dans toute autre supposition, quels doivent être les suites des atteintes que l´on a données et qu´on pourrait encore donner à notre librairie; s´il faut souffrir plus longtemps les entreprises que des étrangers font sur son commerce; quelle