Dissertation

« Il n’est pas besoin pour partir à la découverte de choisir à grand renfort de règles, même édictées par le goût, un fait classé comme sublime. On peut partir d’un fait quotidien : Un mouchoir qui tombe peut être pour le poète le levier avec lequel il soulèvera tout un univers. {…} Les poètes ne sont pas seulement les hommes du beau, ils sont encore et surtout les hommes du vrai, en tant qu’il permet de pénétrer l’inconnu, si bien que la surprise, l’inattendu, est un des principaux ressorts de la poésie d’aujourd’hui. Et qui oserait dire que, pour ceux qui sont dignes de la joie, ce qui est nouveau ne soit pas beau ? » Déclare Apollinaire dans une conférence sur « L’Esprit Nouveau » (1917)

La poésie est, selon Paul Valéry, « l’art de changer ce qui change en ce qui dure ». C’est donc une façon de mettre des sentiments sur le papier pour l’éternité, avec un souci d’esthétisme et de rythme. On peut donc considérer la poésie comme un art traitant du passé. Or Apollinaire nous parle ici de « fait quotidien » et de « nouveau », la poésie se transpose alors dans le présent. Le sujet même de la création poétique est ici remis en cause, comme il le fut au XVIIe siècle avec la querelle des Anciens et des Modernes. Apollinaire dit que la banalité et le quotidien sont des sujets formidables d’inspiration. On peut alors se demander : Peut-on faire de la poésie en s’inspirant du commun, du quotidien? Pour répondre à cette question, nous verrons dans une première partie que le poète peut utiliser le commun en y apportant sa sensibilité pour en faire de la poésie. Puis dans une deuxième partie, nous verrons que la poésie s’oppose aussi au quotidien par son caractère élevé ; enfin, nous verrons qu’Apollinaire repense la poésie avec une idée continue de beauté.

« Tout est matière à poésie ». Cette phrase inclut donc le « commun » dans les sujets d’inspiration poétique. En effet un poète peut, par son talent et sa sensibilité, rendre poétique la plus banale