Née dans l’antiquité, en Grèce, la tragédie est un genre théâtral qui représente les combats de personnages mythiques pour tenter d’échapper, en vain, à leur destin. Selon Aristote, théoricien et philosophe du IVème siècle avant JC, l’un des sujets les plus tragiques de l’antiquité est l’histoire d’Œdipe et de ses descendants racontée à travers trois grandes tragédies de Sophocle. Au XVIIème siècle, en France, la tragédie est considérée comme le genre noble par excellence, illustré par Corneille et Racine, faisant pendant au genre plus prosaïque de la comédie dont Molière est le plus célèbre représentant. Mais à partir du XIXème siècle, les registres tragiques et comiques sont régulièrement mêlés, remettant en question le genre bien codifié de la tragédie. C’est pourquoi on parlera prudemment de « tragédie » pour évoquer des pièces contemporaines comme Incendies de Wajdi Mouawad. Il s’agira ici de se demander ce qui permettrait de caractériser le théâtre tragique de l’antiquité à nos jours, en passant par le classicisme, âge d’or de la tragédie française. En nous appuyant sur les définitions qu’Aristote donne de la tragédie dans sa Poétique, nous verrons que le théâtre tragique peut se définir, dans un premier temps, par sa noblesse de forme et de fond, dans un second temps par ses sujets qui se concentrent sur des conflits intrafamiliaux, et dans un troisième temps par l’effet de catharsis qu’il est censé produire sur les spectateurs.

Pour commencer, nous nous attacherons donc à montrer que le théâtre tragique est le reflet d’une certaine noblesse, tant dans le langage utilisé que dans les personnages principaux.
La tragédie est écrite en langue soutenue, dans un langage très éloigné du langage oral et quotidien : sous forme de vers, plus précisément en alexandrins, comme on a pu le constater dans la pièce Andromaque de Racine : « Son hymen différé, ses charmes sans pouvoir ? » (vers 124). Certains passages de pièces de théâtre peuvent être