Dissertation sur la valeur de l'oeuvre littéraire
Paul Bénichou cherche dans le préambule du Sacre de l’écrivain à le clarifier. Alors que la philosophie et les disciplines rationnelles qui lui sont liées élaborent des systèmes, échafaudent des constructions intellectuelles, s’attellent à ordonner des idées claires, la littérature s’en tient à un stade que l’on pourrait caractériser de premier voire de primaire : elle s’attache au surgissement des idées, là où elles sont mal discernables des passions, des sentiments, des instincts, des intuitions – Paul Bénichou parle d’ « impulsions profondes ».
Ce que la littérature cherche à dégager, au contact du réel, c’est une vérité d’évidence, un « enseignement immédiat ». La littérature indique des voies, des « chemins », qui ne prétendent ni à l’universalité ni à l’atemporalité. C’est dans l’hic et nunc qu’elle se fixe, portée par une pensée que l’auteur du Sacre de l’écrivain et du Temps des prophètes qualifie de « native ». D’où l’assimilation de la littérature au « cri », comme si en elle persistait toujours quelque chose de spontané, d’immédiat, de pressant. Face au monde, la littérature ne cherche pas la distance mais fait entendre sa plainte ou sa révolte comme à l’état brut dans une sorte de contemporanéité fiévreuse.
La littérature pense sur un mode qui lui est propre. La forme que revêt l’œuvre est la marque du lien viscéral qui unit l’idée et la « substance sensible ». L’œuvre littéraire ne