lolC’est donc du pouvoir abusif que nous parlerons. Qu’il soit politique comme c’est souvent le cas, ou d’une autre nature, ce qui est montré au théâtre ce sont ses manifestations les plus injustes, cruelles, stupides, perverses et, pour cela, les dramaturges ont à leur disposition toutes sortes de moyens et toute une série de types de despotes. Caligula dans la pièce de Camus se montre cynique et pervers, forçant Lépidus dont il vient de tuer le fils à répéter qu’il n’est pas de mauvaise humeur, « au contraire » ! Il fait preuve de cruauté morale autant qu’il se livre à des exactions physiques. Il règne par la terreur que répand sa folie. Ubu, de Jarry, est aussi un tyran déséquilibré et grotesque. Aux mauvaises manières partagées avec Caligula, il ajoute la grossièreté dans le langage, ponctuant son discours de « cornegidouille » ou autre « merdre ». C’est un roi fantoche mais tout aussi redoutable, ne réfrénant pas ses plus bas instincts, à commencer par une cupidité féroce. Si Egisthe dans les Mouches de Sartre paraît plus pondéré, ce n’est qu’une illusion car il s’en prend à sa propre famille, méprisant son épouse, sa complice dans le meurtre, et punissant sa belle-fille Electre. Le roi mourant de Ionesco, s’il est dépossédé de son pouvoir et par là-même pitoyable, n’en demeure pas moins inquiétant dans sa mégalomanie et son autoritarisme absurde. Les dramaturges ont donc à leur disposition toute une série de moyens pour représenter les tyrans que ce soient les genres théâtraux, les registres et les variétés de mise en scène. Dans la tragédie, le genre noble s’il en est, le roi ou la reine se doivent d’être grands jusque dans le crime et la démesure. Ainsi Cléopâtre dans Rodogune de Corneille n’hésite-t-elle pas à envisager le meurtre de ses deux fils pour conserver le pouvoir mais elle le fait dans un monologue en alexandrins, dans un style irréprochable et avec une maîtrise de soi qui terrifie mais qui a du panache, c’est