Divers
Horace
Acte IV, scène 2
Situation du texte
Depuis la querelle du Cid (1637), Corneille a posé ce qui constitue, selon lui, l’enjeu du théâtre tragique : il défend son idée d’une esthétique de la gloire, où l’admiration remplace chez le public les sentiments aristotéliciens de la terreur et de la pitié. Dans chacune de ses préfaces, il réitère son souhait fondamental de satisfaire au plaisir du spectateur – objectif atteint le mieux du monde par des rebondissements dans l’intrigue.
Le second de ces principes est rempli sans conteste dans Horace, à travers le découpage du récit du duel entre les champions romains et leurs opposants albains, récit réparti sur deux actes, ce qui ménage la surprise (relative) de la victoire. Mais cet artifice dramaturgique ne sert pas uniquement à créer du suspens, il permet surtout de camoufler un problème moral : comment valoriser la fuite d’Horace (paradoxale " fuit [e] pour mieux combattre " v. 36), comment persuader l’auditoire de la noblesse de la ruse, qui a de surcroît l’apparence de la lâcheté ? L’erreur d’interprétation prolongée du vieil Horace est un moyen de détourner l’attention du spectateur : attentif au renversement d’opinion du père, il en oublie de douter du courage du fils.
Un récit plein d’allant
L’acte III s’est terminé sur l’annonce de la défaite de Rome : deux Horace sont morts au combat, et leur frère a pris la fuite devant les trois Curiace. La fameuse réplique du père (" Que vouliez-vous qu’il fît contre trois ? – Qu’il mourût! ", v. 1021) donne la mesure de son patriotisme intransigeant, et empêche le spectacle de sa colère entêtée, dans cette scène 2 de l’acte IV, de sombrer dans le ridicule. Car le procédé de Corneille, qui explique dans son " Examen " (1660) avoir pris modèle pour ce passage " de l’impatience d’une femme qui suit brusquement sa première idée ", est typique, dans son sexisme ordinaire, du Molière des Femmes savantes ou des Précieuses ridicules.
Le quiproquo