Document 20150225 120745
AJDA 2009 p. 817
Droit mal acquis reste acquis
Sophie-Justine Liéber, Maître des requêtes au Conseil d'Etat, responsable du centre de documentation
Damien Botteghi, Maître des requêtes au Conseil d'Etat, responsable du centre de documentation
René Chapus a eu l'occasion de saluer le progrès du droit administratif avec un humour acide qui n'est pas hors de propos dans le domaine de l'arrêt commenté, celui des actes créateurs de droit. La lecture de la jurisprudence le conduisait en effet à conclure que « s'il est vrai que la complication va de pair avec le progrès (dont elle serait l'inévitable rançon), on doit reconnaître que le droit administratif a beaucoup progressé » (R. Chapus, L'administration et son juge, ce qui change, EDCE 1992, n° 43, p. 259). On aurait donc quelque hésitation à qualifier la décision Coulibaly de progrès, de peur des conséquences. D'autant plus que, dans le domaine des actes créateurs de droits, chaque progrès a entraîné déceptions, voire désespoir. La décision Ternon (CE ass. 26 oct. 2001, Lebon 497 ; Gaja, 16 e éd. n° 111; AJDA 2001.
1034, chron. M. Guyomar et P. Collin
; RFDA 2002. 77, concl. F. Séners et 88, note P. Delvolvé
), conçue pour simplifier un état du droit devenu trop complexe et saluée par la chronique d'alors comme un futur grand arrêt, n'a-t-elle pas fait rapidement l'objet de critiques sévères ? Yves Gaudemet proposait joyeusement de « retirer l'arrêt Ternon »
(AJDA 2002. 738 ), sans compter l'exigeante lecture de l'arrêt par Pierre Devolvé (RFDA 2002. 88, préc.).
Nous espérons que la décision Coulibaly ne sera pas rangée au nombre de ces décisions démontrant que la logique juridique ne rejoint pas l'intuition et que les évidences du juge ne sont pas nécessairement partagées. Elle interdit en effet à un conseil départemental ayant inscrit un chirurgien-dentiste au tableau de l'ordre, condition nécessaire à l'exercice de son art, de mettre fin pour l'avenir à cette inscription s'il s'aperçoit, plus de quatre mois