On peut d'ailleurs noter que si le devoir de neutralité s'impose sans distinction au personnel du service de l'enseignement public à titre individuel, c'est parce qu'il s'applique au service dans son ensemble. Comme l'affirmait Jules Ferry, dans une réponse ministérielle faite au Sénat le 12 mars 1882, il s'agit d'« assurer de la manière la plus scrupuleuse et la plus sévère la neutralité de l'école ». Cette position a été développée dans l'instruction déjà citée de 1883 : « La loi du 28 mars 1882 [...] met en dehors du programme obligatoire l'enseignement de tout dogme particulier. [...] L'instruction religieuse appartient aux familles et à l'Eglise ». C'est pourquoi l'avis déjà cité du 21 septembre 1972 évoque « la neutralité du service de l'enseignement à l'égard de toutes les religions ». C'est ainsi que les manuels scolaires doivent respecter « le principe de neutralité scolaire consacré par la loi du 28 mars 1882 comme une conséquence du régime de laïcité qu'elle a institué » (CE 20 janvier 1911, Sieur Porteret, Leb. p. 68). Comme le rappelait le commissaire du gouvernement Pichat, dans ses conclusions sur cette affaire, « le père de famille, qui estime qu'un livre en usage dans une école primaire publique porte atteinte à ses croyances religieuses et à celles de son enfant, a une action pour obtenir justice ». Le commissaire du gouvernement Tardieu, dans ses conclusions sur l'affaire Girodet c/ Morizot (Trib. confl. 2 juin 1908, Leb. p. 507), précisait ainsi : « Si un père de famille entendait protester contre les tendances générales de l'enseignement de l'Etat, contre les programmes, les méthodes, les livres admis dans les classes, s'il prétendait soutenir que cet enseignement viole la neutralité scolaire promise par la loi de 1882 [...] en admettant qu'une faute ait été commise, cette faute serait le fait de l'Etat qui a promis une école neutre. C'est donc à lui que le père de famille devrait réclamer, le cas échéant, une indemnité