Ebook
Créateurs de livrels indépendants. v. 5.0
1 L’amour fou
Cette histoire est une fiction. Je l’ai imaginée un jour que je me trouvais sur la terrasse du Mirage, au-dessus des grottes d’Hercule à Tanger. Mon ami A. m’avait prêté un bungalow pour prendre un peu de repos et éventuellement écrire. Face à l’immense étendue d’une plage où viennent s’échouer des vagues de l’océan Atlantique, dans ce désert de sable et d’écume un palais a été construit en quelques mois. Je ne sais pas à qui il appartient. Les gens disent que c’est la cabine de bain d’un prince lointain amoureux de la mer et du silence de cette région. D’autres l’attribuent à un armateur grec qui, ne supportant plus la mer Méditerranée, a choisi cet endroit pour finir ses jours et surtout pour échapper à la justice de son pays. Ici la mer est bleue. La mer est verte. Sa chevelure est blanche. En face, la cabine de bain du prince ou de l’armateur a pris les teintes du sable. Ce n’est pas hideux. C’est incongru, comme cette histoire que j’ai inventée un soir en écoutant une chanteuse à la radio. La rumeur l’a attribuée à une chanteuse ou à une danseuse qui a vraiment existé. Je n’ai pas cherché à vérifier. Les gens adorent raconter et se raconter des histoires. Celle-là en est une parmi d’autres. Que personne n’aille s’identifier à l’un des personnages. Toute fiction est un vol de la réalité et il lui arrive d’y retourner et de s’y confondre. Un journal du Proche-Orient a parlé dernièrement d’une actrice égyptienne qui aurait disparu. Un autre magazine a suggéré que ladite comédienne aurait tout inventé pour qu’on parle d’elle. Cette histoire est arrivée il y a quelques années, à l’époque où le pays ouvrait généreusement ses portes à des visiteurs d’un type particulier, des hommes qui se déplaçaient du fin fond du désert d’Arabie pour s’offrir quelques nuits de luxure. Des nuits blanches où les vapeurs d’alcool enrobaient les regards vitreux