Emedia
Chapitre 1
Le « pouvoir des médias »
Tout au long du XXe siècle, l’histoire de la sociologie des médias a été très étroitement liée à la diffusion des différents médias de masse. La grande presse populaire, et plus encore la radio puis la télévision, ont suscité d’intenses inquiétudes dans l’esprit de nombreux hommes politiques, éducateurs, parents, gens d’église, etc. Ces nouveaux moyens de communication, pense-t-on de façon récurrente, ne risquent-ils pas de généraliser des comportements violents ou asociaux, de favoriser le repli sur soi, de fissurer l’homogénéité des groupes primaires et notamment de la famille, de provoquer une dégénérescence du débat public, d’encourager une soumission passive à des pouvoirs démagogues ? Bre f, ne risquent-ils pas de rendre impossible l’idéal de la citoyenneté? Pi re encore, ne risquent-ils pas, aux mains de régimes despotiques ou totalitaires, d’entraîner les foules vers la violence et la guerre, comme le laisse craindre l’utilisation apparemment décisive de la radio par le IIIe Re i c h ? C’est pour une grande part en réponse à ces inquiétudes, pour mieux en mesurer l’exactitude et la portée, que la sociologie des médias s’est développée. Qui plus est, les pre m i è res études empiriques, réalisées au début des années 1940, ont été commanditées par le gouvernement américain qui, une fois les USA entrés en guerre, s’est soucié de savoir quel discours tenir à la radio pour convaincre la population américaine de la nécessité de l’eff o rt de guerre. Pour toutes ces raisons, la sociologie des médias s’est d’abord focalisée sur la question des effets des médias : dans quelle mesure la propagande atteint-elle son but, dans quelle mesure réussit-elle à persuader le public ? Dans ce premier chapitre, on va donc se concentrer sur les travaux qui ont abordé la question des effets. Les médias sont-ils, comme beaucoup l’ont cru (ou craint), omnipotents? On va constater d’abord que le pouvoir
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LE POUVOIR DES MÉDIAS