Entretien de Claude Mazauric avec Zhou Lihong (4 février 2009) Zhou Lihong: Je vous remercie d’abord d’accepter cet entretien. On commence par votre origine familiale. Vous avez dit dans votre entretien avec Julien Louvrier que «Je suis très fier de mes origines familiales, populaires, paysannes, modestes assurément; Par elles, je me sens profondément inséré dans cette France« roturière» qui nous a faits ce que nous sommes devenus... Il n’y a dans mon ascendance ni exploiteurs, ni esclavagistes, ni barons, ni privilégiés, ni trafiquants: c’est un grand bonheur que cet héritage quasiment immaculé! ». Je voudrais savoir si c’est cette origine qui vous a poussé à devenir un « marxiste », ou si le marxisme a influencé votre expression relative à votre origine? C.M. Non, évidemment ! Il n’y a pas de détermination mécanique entre l’origine sociale individuelle d’un être humain dont la « biographie » est toujours singulière et la construction de la personnalité, sujette à beaucoup de variables… Mais je dirais que mon origine populaire , « roturière » pour employer un mot contemporain de la Révolution française, origine paysanne plutôt que prolétarienne, a inscrit ma vie dès son départ du côté de ces français qui n’étaient pas partie prenante des classes dominantes et dirigeantes : c’est essentiel, mais l’histoire du temps qui fut le mien a fait le reste… Zhou Lihong: Je sais que votre père est le premier de sa «dynastie paysanne» à avoir échappé à la fatalité de la «reproduction». Il a perdu l’épaule droite et le pavillon auriculaire du même côté pendant la première guerre mondiale. Après son rétablissement il a reçu une formation scolaire à l’Ecole des Mutilés de Nîmes et ensuite il a travaillé dans les chemins de fer puis est devenu fonctionnaire des Douanes. Il était un républicain, un syndicaliste, un admirateur de Jean-Jacques Rousseau. Veuillez vous me dire l’influence de votre père sur votre chemin de vie. C.M. Je dois à la passion républicaine de mon père et à son