Exposé Art 1169
La lutte contre les clauses abusives est l'un des meilleurs moyens de promouvoir la justice contractuelle. Longtemps, elle s'est faite un peu à la diable, clause par clause. De manière casuistique, les autorités publiques s'avisaient du danger présenté par telle ou telle, s'employant à le supprimer ou à le limiter par une règle spéciale. Clause pénale, clause d'exclusivité, clause de non-concurrence, clause attributive de compétence: autant d'exemples illustrant une approche ponctuelle. Enfin, le concept de clause abusive vint. En droit de la consommation, d'abord (C. consom., art. L. 132-1 s.). En droit des affaires, ensuite (C. com., art. L. 442-6-I-2o). Une catégorie juridique était née, qui permet de traquer l'abus en tant que tel, indépendamment du type de clause considéré. A cet égard, l'article 1169 est le point d'acmé d'une évolution: il généralise la catégorie à l'ensemble des contrats de droit privé.
Symboliquement, le texte est important. Les adeptes de l'autonomie de la volonté regretteront peut-être qu'il consacre une influence délétère d'une logique consumériste sur le droit civil. Mais précisément: ne serait-ce pas le signe qu'il exprime un changement de philosophie contractuelle? Certes, le premier principe qui coiffe les dispositions du droit des contrats refondu reste celui de la liberté contractuelle (art. 1102), tempéré par l'exigence de bonne foi (art. 1103). Qu'un article du code civil fustige les clauses abusives au sein d'un chapitre consacré à la validité du contrat en général, il y a cependant ici une profonde mutation.
B. Les changements
La structure de l'article 1169 laisse à désirer. Pourquoi poser dans un premier alinéa la définition et la sanction de la clause abusive pour revenir dans un second sur le cadre d'appréciation de l'abus? Il eût été plus clair de dédier un paragraphe à la définition (1), un autre à la sanction (2).
1 – L'extension de la notion de clause abusive à tous les contrats de droit privé