Faut-il préférer le bonheur à la vérité
IL FAUT PREFERER LE BONHEUR A LA VERITE
LA VERITE OU LA RECHERCHE DE LA VERITE RENDENT MALHEUREUX
A. IL FAUT PREFERER LE BONHEUR A LA VERITE PARCE QUE LA VERITE ESTINSUPPORTABLE
Peut-être que « la vérité » dans son sens le plus général – la vérité du monde la vérité de notre condition humaine – est horrible, insupportable. Peut-être que nos souffrances humaines n’ont pas de sens, que l’injuste inégalité entre les hommes n’aura jamais de fin, que notre existence est absurde : que c’est cela…« la vérité ». Alors il faudrait s’en détourner, n’y plus penser et, effectivement, lui préférer le bonheur, si toutefois nous pouvons être heureux dans l’évitement de cette vérité .Mais c’est bien ce que présuppose le libellé : « faut-il préférer le bonheur à la vérité ? » laisse en effet entendre, d’une part, que bonheur et vérité existent, d’autre part, qu’il est possible de les dissocier : de vivre heureux sans se soucier de la vérité, ou de vivre pour la vérité mais en sacrifiant son bonheur. On trouve dans la première œuvre de Nietzsche, La Naissance de la tragédie, cette idée que la vérité de la condition humaine est trop dure à supporter, qu’il nous est impossible de la regarder en face : impossible de regarder en face le fait que notre souffrance n’est ni méritée ni rédemptrice, impossible de regarder en face le grand rire amoral de Dionysos, le dieu de l’Ivresse et de la Cruauté, devant l’absence de sens de nos vies. C’est pourquoi, poursuit Nietzsche, nous avons besoin de nous détourner de cette vérité, qu’il nomme donc dionysiaque, et de la fuir en l’embellissant avec des formes apolliniennes : avec cette beauté superficielle de l’art capable de nous donner un peu de bonheur.« Nous avons l’art, pour ne pas mourir de la vérité », Nietzsche, La Naissance de la tragédie (1782), Folio, 1989.En généralisant cette idée, nous pouvons affirmer que, si la vérité ne peut que nous rendre malheureux, il nous reste la possibilité de la fuir et de chercher notre