Faut-il se méfier de la consciences
Idées :
La conscience comme présence du sujet au monde
" Revenir à soi, c’est revenir au monde, c’est-à-dire précisément à autre chose que soi ", disait Valéry. En effet, perdre conscience (s’évanouir), c’est perdre à la fois le monde et soi-même, c’est s’abîmer dans le néant (" être, c’est être perçu ou percevoir ", Berkeley). Dès lors, la conscience est la condition de toute présence : présence au monde comme à soi. C’est la conscience qui fait que, pour un être, il y a bien quelque chose (le monde comme lui-même). C’est elle qui fait qu’un être n’est pas seulement dans le monde (comme une chose enfouie parmi les choses), mais est devant le monde (comme un sujet se tenant face à un objet). La conscience, on le voit, suppose nécessairement une distanciation, une séparation par rapport à la compacité opaque du réel. Sans ce décalage ou cette trouée (Sartre), il n’y aurait ni connaissance (conscience perceptive ou psychologique) ni jugement (conscience morale). Si l’on ne pouvait s’écarter au moins un peu de l’être, on ne pourrait ni le voir ni le connaître ; si l’on ne pouvait séparer au moins un peu l’être de ce qu’il doit être (sa valeur), on ne pourrait pas le juger normativement. Et sans doute faut-il dire avec Alain que " Toute conscience est d’ordre moral, puisqu’elle oppose toujours ce qui devrait être à ce qui est. "
La conscience c’est la personne, à la fois grande et misérable
La conscience, en plaçant l’individu devant le monde, lui fait occuper une position unique et imprenable, une situation sans autre coïncidence qu’elle-même.
Deux consciences, en effet, ne peuvent occuper exactement la même situation, ni fusionner (l’amour lui-même, pour reprendre le poète Rilke, n’est jamais que l’inclination de deux solitudes l’une vers l’autre). C’est là l’irréductible solitude de toute conscience. Mais c’est aussi, pour de très nombreux philosophes, la marque de la dignité de l’homme, seul être conscient et donc