Faut-t-il respecter toutes les opinions ?
1) L'opinion est généralement plébiscitée.
Qui ne tient à ses opinions ? Chacun dans l'existence a un avis, veut le faire partager et généralement défend avec conviction ce qu'il considère comme un avis autorisé, sans pour autant reconnaître que la détermination à défendre son avis est plus une tentative de persuader l'interlocuteur, parfois en jouant sur ses craintes ou ses désirs, qu’un effort pour trouver des arguments rationnels. Les opinions semblent émaner de notre personne, être attachées à elle, comme si elle était notre bien propre. Nous n’avons pas d'opinion sur tout, mais sur presque tout. C'est la raison pour laquelle nous discutons aussi bien des choses qui nous plaisent (les partisans de la cuisine légère s’opposent aux amateurs de tête de veau), que de celles qui sont belles : l’opinion est versatile mais grossière, sinon ambitieuse dans ses intentions. L’indignation par exemple, est le passage obligé de toute exhortation morale par laquelle se déploie la liste de ce qu'il convient de faire. Par l'opinion, nous ouvrons une fenêtre non seulement sur le régime de vie d'une population, à un moment donné de son histoire, mais nous pouvons aussi avoir accès au tempérament de l’individu, à son mode d'être, et à la qualité de son âme. Les opinions nous renvoient ainsi à un modèle de la vie politique qui nous rappelle la formule de Platon au début de la République, lorsqu'il indique à ses interlocuteurs, que pour voir l'âme humaine « en gros caractères », il fallait pouvoir opérer cette lecture en regardant les institutions politiques : ce qu'est un individu, il le doit à la manière dont il a été éduqué. Et l'éducation dépend elle aussi des institutions régies par la loi, qu'il s'agisse de la famille ou de l'école.
Aussi est-ce à bon droit que nous pouvons considérer les opinions comme le reflet plus ou moins déformé qui prend sa source dans la polis. La société elle-même n'étant pas homogène, il est naturel de voir une