Fiche de lecture Susan Sontag Sur la photographie Dans la cave de Platon Depuis de nombreuses décennies, le livre est la façon la plus répandue de présenter ( dans la plupart des cas, en les miniaturisant) les photographies sont des objets fragiles, aisément déchirés ou égarés -, et un plus vaste public. La photographie publiée dans un livre est, cela va de soi, l'image. Mais étant à l'origine elle-même un objet imprimé et lisse, une photographie perd beaucoup moins de sa qualité essentielle, à être reproduite dans un livre, qu'une peinture. Toutefois, le livre n'est pas un procédé totalement satisfaisant quand il s'agit de diffuser des ensembles de photographies. p Cependant,il reste quelque chose de prédateur dans l'acte de prendre une photo. Photographier des gens, c'est les violer, en les voyant comme ils ne se voient jamais eux-mêmes, en ayant d'eux une connaissance qu'ils ne peuvent jamais avoirs; c'est les transformer en choses que l'on peut posséder de façon symbolique. De même que l'appareil photo est une sublimation de l'arme à feu, photographier quelqu'un est une sublimation de l'assassinat : assassinat feutré qui convient à une époque triste et apeurée. Nous sommes a présent en plein dons une époque nostalgique, et les photographies est un art élégiaque, un art crépusculaire. Par la seule vertu de la photographie, l'aile du pathétique effleure presque tous les sujets. Un sujet laid ou grotesque peut être émouvant, du fait de la dignité que lui a conférée l'attention du photographe. Un beau sujet peu cristalliser la tristesse, du fait de son vieillissement, de sa dégradation ou de sa disparition. Toutes les photos sont des mémento moi. Prendre une photo, c'est s'associer à la condition mortelle, vulnérable, instable d'un autre être (ou d'une autre chose). C'est précisément en découpant cet instant et en fixant que toutes les photographies témoignent de l'oeuvre de dissolution incessante du temps. Une photo est à la fois une pseudo-présence et une marque