Depuis l’abolition de l'esclavage en 1848, on s’accorde à dire qu’en France, tout individu acquiert la personnalité juridique dès la naissance. Néanmoins, par exception, il arrive que le droit fasse rétroagir le début de la personnalité juridique au moment de la conception ce que nous rappelle ici la première Chambre Civile de la Cour de Cassation dans cet arrêt du 10 décembre 1985. Le 20 juin 1979, Bernard Segers avait adhéré à une police d’assurance-groupe de la Compagnie Européenne d’Assurances sur la Vie (Euravie) ayant pour garantie le versement d’un capital par enfant à charge vivant au foyer de l’assuré en cas de décès de celui-ci. Après la mort du contractant le 1er mai 1980, son épouse Brigitte Segers mit au monde deux jumeaux le 24 mai 1980 qui n’étaient alors pas nés au moment de la réalisation du risque visé par la police d’assurance vie. Aussi, alors que la compagnie d’assurance refusait de tenir compte des deux nouveaux-nés dans le calcul du montant dû à la famille du défunt, Mme Segers saisit la justice afin d’obtenir le paiement de la somme complémentaire pour ses jumeaux. A cela, les juges de fond la déboutent au motif que « la clause de police était envisagée comme une notion de seul fait et que les enfants dont il s’agit ne vivaient pas au foyer de l’assuré ». Mme Segers forme alors un pourvoi en Cassation. Est-il possible de faire rétroagir la personnalité juridique dès la conception quand il en va de l’intérêt de l’enfant? Face à cette interrogation, la Cour de Cassation admet alors que les conditions d’application du contrat d’assurance-décès doivent être prit en compte au moment de la réalisation du risque puis elle dégage que les principes généraux du droit prévalent sur les stipulations contractuelles ici