« L’affaire du théâtre est de divertir les gens » : selon Brecht, le théâtre remplirait une fonction bien particulière : mais que peut-on entendre par « divertissement » ? Le théâtre est une fête divertissante, un spectacle qui se déroule dans une salle décorée avec faste et traditionnellement ornée de fauteuils en velours rouge. Le spectateur lui-même s’habille pour sortir, les acteurs eux-mêmes déguisés avec soin viennent dérouler un spectacle vivant sous les yeux du public. Sur la scène, des costumes, des fards, des lumières, des décors et de la musique forment la mise en scène, autrement dit participent du divertissement. Du théâtre de foire au Moyen-Age au café-théâtre d’aujourd’hui en passant par tous les spectacles de rue au XVIIème, le théâtre est divertissant parce qu’il emmène son public dans un univers imaginaire pour le temps de la représentation. La comédie-ballet pratiquée par Molière dans Le Bourgeois Gentilhomme par exemple est un divertissement, une fête jouée par les personnages avec beaucoup d’allégresse entre chaque acte ou encore à la fin de la pièce, lors de l’intronisation de M. Jourdain en « mamamouchi » qui se termine en « divertissement » (le mot est de Molière) pour le comte du faux grand Duc, altesse Turque. Mais le divertissement, qui fait vivre des émotions diverses (se divertir, c’est rire, mais c’est aussi pleurer, être ému, ressentir de la crainte, de la pitié, de la joie, de la déception), est aussi par là un moyen d’échapper au quotidien. Tout spectacle crée une évasion, déconnecte, crée une illusion. Le théâtre est le monde de l’imaginaire, du factice, de la convention (double énonciation, a parte…). Le divertissement est donc une sortie du réel, un détournement dans le sens latin de « divertere », se détourner de. Le spectateur se détourne de sa propre vie, cesse de penser et de réfléchir à sa vie, à sa condition durant le temps où il est diverti. Le sens pascalien du divertissement prend toute sa mesure au théâtre : le