Lecture analytique. Francis Ponge, « L'huître », 1942. Eléments pour une introduction Francis Ponge (1899-1988) occupe une place originale dans la poésie française puisqu'au moment même où de nombreux poètes, pour la plupart issus du Surréalisme comme Eluard ou Aragon, écrivent des poèmes engagés ou bien célèbrent l' « amour fou », il publie, en 1942, un recueil intitulé Le Parti Pris des Choses rassemblant 32 petits poèmes en prose consacrés aux choses les plus ordinaires et a priori les moins poétiques de la réalité quotidienne. Il s'agit des « choses » au sens large, c'est-à-dire des animaux (crevette, papillon, escargot), des minéraux (le galet), des objets (le cageot, la bougie), des comestibles (le pain, l'orange). Ponge définissait ses textes comme des « proèmes », un terme qu'il avait inventé lui-même, réunissant l'idée de prose et de poème. « L'huître » fait partie de ses textes les plus célèbres et Francis Ponge l'a souvent commenté lui-même. Le style frappe tout d'abord par sa dimension descriptive et objective très marquée, à l'opposé d'une conception traditionnelle de la poésie (Ie partie). En même temps s'expriment une relation du poète avec l'objet ainsi qu'une réflexion sur la poésie (IIe Partie). I Une description objective de l'huître, à l'opposé d'une conception traditionnelle de la poésie 1°) L'organisation du texte Le poème n'est pas versifié ni disposé en strophes. Il s'agit de prose mais cette prose est néanmoins extrêment travaillée. La structuration du texte en trois paragraphes est importante car elle est porteuse de sens. Le premier paragraphe, qui est le plus long, rend compte tout d'abord de la coquille et de son ouverture, le second décrit le monde intérieur de l'huître et le troisième, réduit à une seule phrase, évoque la perle que l'on peut éventuellement y trouver. Une progression est inscrite dans le texte: on passe de l'extérieur à l'intérieur, de l'idée de solidité blessante (« rugueux », « coupent », « cassent ») à celle de