Galeran
Bretagne etL’Escoufle non comme les premiers romans « réalistes », selon une approche critique communément répandue, mais comme des fictions fortement marquées par le roman idyllique dont elles essaient de dépasser les tensions et les limites pour offrir une résolution harmonieuse « conjugu[ant] l’activité féminine aux attentes généalogiques et sentimentales du scénario idyllique » (p. 426). Avant de consacrer une grande partie à chacun de ces romans lu dans cette perspective nouvelle, l’auteur se livre à une étude passionnante de plusieurs fictions idylliques : Floire et Blancheflor, Pirame et Tisbé, le Lai de Narcisse, Floris et Lyriopé, Aucassin et Nicolette et Guillaume de Palerne, non sans se pencher aussi sur le cas de Tristan et Iseut.
2Malgré son sous-titre qui laisserait penser qu’il ne s’intéresse qu’à deux romans, le livre brosse un tableau remarquablement ample de la production idyllique, d’une part en établissant de nombreuses comparaisons avec des œuvres plus ou moins contemporaines (outre celles déjà citées, Guillaume de Dole, le Lai de l’Ombre, La Chastelaine de Vergy, Jehan et Blonde), d’autre part en débordant le cadre chronologique du XIIIe siècle pour convoquer des romans tardifs qui peuvent attester la postérité des œuvres étudiées (Eledus et
Serena, Paris et Vienne, Pierre et Maguelonne, par exemple).
3Le dessein du livre est de montrer que Galeran et L’Escoufle, loin d’être influencés par un quelconque courant réaliste, sont l’aboutissement réussi d’une réflexion sur le couple amoureux et la réconciliation possible du politique et du sentimental. Examinant la structure du roman idyllique, M. Vuagnoux-Uhlig s’intéresse aux couples, parental et héroïque, et aux relations qui s’y nouent entre les sexes. La gémellité, l’équilibre entre masculin et féminin, la complexe interaction entre mère et fille, la promotion d’une héroïne féminine d’un nouveau genre, le thème de la mésalliance, autant