Homère
Homère selon les Anciens
[pic]
[pic]
Homère et son guide, par William Bouguereau (1874)
La tradition veut qu'Homère ait été aveugle. Tout d'abord, l'aède Démodocos, qui apparaît dans l'Odyssée pour chanter des épisodes de la guerre de Troie, est aveugle : la Muse lui a « pris les yeux, mais donné la douceur du chant[3] ». Ensuite l'auteur de l'Hymne homérique à Apollon Délien déclare à son propre sujet : « c'est un aveugle, qui réside à Chios la rocailleuse[4] ». Le passage est repris par Thucydide, qui le cite comme un passage où Homère parle de lui-même[5].
L'image du « barde aveugle » est un lieu commun de la littérature grecque. Un personnage d'un discours de Dion Chrysostome remarque ainsi que « tous ces poètes sont aveugles, et croient qu’il serait impossible de devenir un poète autrement » ; Dion répond que les poètes se transmettent cette particularité comme une sorte de maladie des yeux[6]. De fait, le poète lyrique Xénocrite de Locres est réputé être aveugle de naissance[7] ; Achaïos d'Érétrie devient aveugle pour avoir été piqué par des abeilles, symbole des Muses[8] ; Stésichore perd la vue parce qu'il a dit du mal d'Hélène de Sparte[9] et Démocrite s'ôte la vue pour mieux voir[10].
Tous les poètes grecs ne sont pas aveugles, mais la fréquence avec laquelle la cécité est associée à la poésie pousse à s'interroger. Martin P. Nilsson remarque que, dans certaines régions slaves, les bardes sont rituellement qualifiés d'« aveugles »[11] : comme le soutient déjà Aristote[12], la perte de la vue est supposée stimuler la mémoire. De plus, la pensée grecque associe très fréquemment cécité et pouvoir divinatoire : les devins Tirésias, Ophionée de Messène, Événios d'Apollonie ou Phinée sont tous privés de la vue. Plus prosaïquement, le métier d'aède est l'un des rares accessibles à un aveugle dans une société comme celle de la Grèce antique[13].
Plusieurs villes ioniennes (Chios, Smyrne, Cymé ou encore Colophon) se disputent l'origine