Hugo, les orientales, 1829
Hugo, Les Orientales, 1829
Rêverie
Oh ! Laissez-moi ! C’est l’heure où l’horizon qui fume
Cache un front inégal sous un cercle de brume,
L’heure où l’astre géant rougit et disparaît.
Le grand bois jaunissant dore seul la colline :
On dirait qu’en ces jours où l’automne décline,
Le soleil et la pluie ont rouillé la forêt.
Oh ! Qui fera surgir soudain, qui fera naître,
Là-bas, - tandis que seul je rêve à la fenêtre
Et que l’ombre s’amasse au fond du corridor,
Quelque ville mauresque, éclatante, inouïe,
Qui, comme une fusée en gerbe épanouie,
Déchire ce brouillard avec ses flèches d’or !
Qu’elle vienne inspirer, ranimer, ô génies !
Mes chansons, comme un ciel d’automne rembrunies,
Et jeter dans mes yeux son magique reflet,
Et longtemps, s’éteignant en rumeurs étouffées,
Avec les mille tours de ses palais de fées,
Brumeuse, denteler l’horizon violet !
Texte 2
Nerval, Odelettes, 1835
Fantaisie
Il est un air pour qui je donnerais
Tout Rossini, tout Mozart et tout Weber,
Un air très vieux, languissant et funèbre,
Qui pour moi sel a des charmes secrets !
Or, chaque fois que je viens à l’entendre,
De deux cents ans mon âme rajeunit.
C’est sous Louis treize ; et je crois voir s’étendre
Un coteau vert, que le couchant jaunit.
Puis un château de brique à coins de pierre,
Aux vitraux teints de rougeâtres couleurs,
Ceint de grands parcs, avec une rivière
Baignant ses pieds, qui coule entre des fleurs ;
Puis une dame, à sa haute fenêtre,
Blonde aux yeux noirs, en ses habits anciens,
Que, dans une autre existence peut-être,
J’ai déjà vue…et dont je me souviens !
Sujet : Comparez les paysages évoqués dans chacun de ces deux poèmes.
Aide : type de paysage évoqué, moment de l’évocation, éléments de description, caractérisation des éléments de description, utilisation valorisante ou dévalorisante du vocabulaire, figures de style, mouvement du regard, point de vue, rapport paysage évoqué et