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Les dessins de Victor Hugo
Dans l’ombre de l’homme public, à la fois poète, dramaturge et romancier, se cache la figure nocturne de l’artiste graphique. Dès l’enfance, les carnets d’Hugo révèlent un goût à laisser courir sa plume selon les caprices du hasard ou de l’inconscient. Mais c’est surtout lors de ses voyages avec Juliette Drouet, illustrés de nombreuses compositions à la mine de plomb, que se développe sa veine picturale. Dans les années 1840, la révélation du Rhin puis la mort tragique de sa fille Léopoldine accentuent en lui le goût du fantastique et des ténèbres. Très pris par ses activités politiques, il délaisse quelque peu l’écriture pour dessiner sans relâche un univers à la mesure de son imagination : vues de châteaux surnaturels ou fantomatiques, de forêts angoissantes, d’aspects insolites de Paris ou de mystérieux végétaux. L’exil, tout en renouvelant son inspiration, suscite des expériences propres à traduire sa fièvre de création : fusain, gouache, sépia, aquarelle, mais aussi pochoirs, découpages, cartons…
L’œuvre graphique d’Hugo est un univers de contrastes où tout semble déconstruit et reconstruit sous l’effet d’une imagination libérée des contraintes de l’écriture. Si pour le poète, les voyelles portent les couleurs de l’arc-en-ciel, son langage graphique révèle un chaos traversant toutes les nuances du noir et du blanc. Orages, tempêtes, paysages tourmentés, brumes des cimes, burg fantastique, où le plus petit, soumis aux « grossissements de la rêverie » peut devenir gigantesque : les « choses vues » deviennent visions, mirages où seul le caprice de l’imaginaire préside au destin de l’image. La réalité n’existe que dans les mouvements de la « désagrégation » et des « nuées » : « ceci flotte et se décompose, ceci est stable et incohérent.
Un reste d’angoisse est dans la création ». L’activité graphique ouvre la voie à cette angoisse échappée de la conscience car « on ne peut rien saisir, on a sur soi on ne sait quelle