Incipit de succession ouverte
Incipit de Succession ouverte de Driss Chraïbi pp. 11-12 (...jusqu’à "Seize ans de patience !")
A l’isotopie de l’être humain s’ajoute celle du temps comme la plus appropriée pour mettre en valeur et dévoiler les recoins les plus profonds de la nature humaine. Le texte à analyser est l’incipit qui ouvre le roman de Driss Chraïbi, la Succession ouverte, paru en 1962 après le Passé simple (1955 ) et les Boucs (1956) . Prolongement narratif du premier roman de l’auteur où il était question d’une « révolte contre le Seigneur à un âge où je ne savais rien » (p. 23), Driss retrouve les siens suite à la nouvelle du décès de son père pour faire le bilan d’une absence qui a duré seize ans à l’étranger. (LECTURE)
Depuis l’ouverture du roman, le narrateur ne cesse de focaliser la lumière sur le personnage de Driss à travers l’usage du pronom de la première personne du singulier pour en faire le sujet et l’objet d’une autocritique. Mêlant récit et discours, narration et description, le personnage se présente au lecteur à travers une focalisation interne puis externe suivant les deux mouvements du texte : le premier composé essentiellement d’un discours où il est question d’un bilan introspectif du personnage. Le second, où le récit autobiographique commence avec une indication spatio-temporelle comme cadre dans lequel va évoluer la trame narrative du roman.
Comment, sur un tableau de fond représentant le conflit entre le Temps et la Mémoire., le narrateur parviendra-t-il à entamer son récit autobiographique et donner naissance au héros dont il se détache progressivement ?
Le texte s’ouvre sur une phrase nominale formée de trois termes qui renvoient tous au champ lexical de la mort. De par sa composition trilogique, ce début exprime un statisme qu’explicite l’absence du verbe d’une part et le sémantismes de ce triptyque d’autre part : en effet, le noir renvoie aux ténèbres des tombes, le froid caractérise tout cadavre enterré et l’absence de