Les caractéristiques communes des quatre incipits proposés à savoir celui de Gil Blas de Santillane de Lesage, un roman picaresque du XVIIIème siècle, celui de l’Assommoir de Zola, modèle de roman naturaliste et les deux incipits de romans du XXème siècle que sont l’étranger de Camus et Le Ravissement de Lol.V.Stein de Duras sont tout d’abord de proposer la présentation du personnage principal, qu’il soit éponyme comme dans Gil Blas ou le Ravissement de Lol.V.Stein ou non comme dans l’Assommoir qui nous présente Gervaise et l’étranger qui est centré sur le personnage du narrateur. En fonction du mode de narration choisi par l’écrivain, l’accent est plus ou moins mis sur l’importance du personnage : en effet chez Zola, le choix de la focalisation interne fait ressentir ce que perçoit Gervaise et dans l’Etranger, le récit à la première personne fait que le lecteur se polarise sur le personnage narrateur en écho avec les interrogations qui suscite le titre. Conformément à ce que l’on attend d’un incipit, les quatre textes nous présentent également le cadre spatio-temporel ; l’espace d’ailleurs est évoqué avec plus de précision que le temps : nous situons aisément l’action du Gil Blas en Espagne, celle de l’Assommoir dans un quartier parisien, l’Etranger s’ouvre à Alger et le texte extrait du roman de Duras parle d’un nom de lieu, S.Tahla.L’on trouve également dans les quatre incipit, une indication en ce qui concerne l’action proprement dite du roman : elle est « lancée » dans le Gil Blas par un départ du personnage à la conquête du « monde », dans L’Assommoir par l’attente de Gervaise qui s'inquiète du "découchage" de Lantier , Créqui crée un suspens et des interrogations sur la stabilité du couple et sa situation sociale, dans l’Etranger, par une étape habituellement marquante dans la vie d ‘un individu, la disparition de la mère, le roman de Duras s’ouvrant sur une enquête menée par des tiers sur le personnage éponyme.