Interprétation
Introduction
Le sens commun affirme volontiers qu’une interprétation est nécessairement subjective, c’est-à-dire propre à celui qui l’émet, sans qu’il puisse prétendre l’imposer aux autres. Notre réaction face aux œuvres d’art en est un exemple frappant. Chacun donne son avis sur le sens de ce qu’il voit et tout
©HATIER
le monde admet que ce jugement n’a pas de valeur objective. L’interprétation apparaît ainsi comme une forme de pensée plutôt mineure. Si elle relève du libre arbitre de chacun, cette liberté devrait reconnaître qu’elle ne peut prétendre à aucune vérité. Est-il juste d’en parler ainsi ? Interpréter n’est-il qu’une affaire de goûts et de couleurs où il suffit de donner son opinion ? C’est peut-être oublier que tous les choix ne sont pas équivalents. Comme dans d’autres domaines, il est possible de faire un mauvais usage de sa liberté. Il est donc légitime de se demander si l’interprétation est une affaire de choix, cette dernière expression devant, elle aussi, être explicitée.
1. Interprétation et démonstration
A. La démonstration Cherchons d’abord à cerner la spécificité de l’acte interprétatif. Si la notion renvoie d’abord à l’idée d’explication, celle-ci manque encore de précision. En effet, « expliquer » signifie étymologiquement « développer ». Cette opération fait voir comment des effets ou des propriétés dépendent nécessairement de certaines causes. Or ceci convient avant tout à la démonstration. Les géomètres raisonnent à l’aide de figures pour établir que la somme des angles d’un triangle est toujours égale à celle de deux angles droits, quel que soit le triangle considéré. Selon Leibniz, la démonstration est un enchaînement de propositions qui se déploie par déductions à partir d’hypothèses tenues pour assurées. Ce mouvement a pour but d’aboutir à une et une seule conclusion dont la vérité ou la fausseté peuvent être prouvées par