Introduction au taijiquan du shenjiying (josé carmona)
Les deux pieds en élévation
De nos jours, les noms des grandes figures de l’âge d’or du Taiji quan, tels que Yang Luchan, Yang Banhou ou Quanyou, sont connus de nombreux pratiquants occidentaux. Paradoxalement, ces personnages semblent dénués d’existence historique. En effet, ils ne sont signalés dans aucun document de l’époque et cette carence d’informations explique que la mémoire de cette discipline entremêle à ce point anecdotes et légendes. Pour aller au-delà du mythe, il est nécessaire de resituer la « boxe du Faîte Suprême » en son temps et de préciser le cadre dans lequel cette pratique fut tout d’abord transmise à Pékin au cours de la seconde moitié du XIXème siècle. En suivant le fil d’Ariane d’une transmission méconnue remontant à Quanyou et Yang Banhou, nous sommes ainsi amenés à découvrir un autre Taiji quan relié à une institution militaire de la dynastie Qing, le Shenji ying.
La transmission de la forme ancienne de Quanyou À la fin des années 1950, alors que le Taiji quan connaissait une popularité alors sans précédent en Chine, un Mandchou d’une cinquantaine d’années, Chang Yunjie (1906-1970), entreprit de transmettre une version inhabituelle de cet art. Cet anonyme d’un quartier pauvre de Shanghai n’enseigna qu’à une quinzaine de personnes au plus la technique qu’il détenait lui-même de son père, Chang Yuanting. Le fait serait passé totalement inaperçu si le célèbre Gu Liuxin, cadre communiste promoteur du Taiji quan sous Mao, n’avait
mentionné cette curiosité dans une note figurant à l’identique dans plusieurs de ses ouvrages : « Chang Yuanting (1860-1918) apprit la petite forme (xiao jia) détenue par Quanyou. Celle-ci comporte des élévations et des descentes, des jaillissements internes de l’énergie et des sauts » (1). Au cours des années soixante, Gu assurait la présidence de l’association de Shanghai de Wushu. Ayant eu vent de la pratique peu courante de Chang Yunjie, il invita ce dernier à